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Évaluation de l'article

IV. — Une distinction mouvante aux frontières évolutives


Dans une dernière mise en perspective, nous proposons de nous intéresser à des formes singulières de frontières entre le lobbying et le plaidoyer. En ce sens, nous avons fait le choix de mettre l’emphase sur les nouvelles manifestations et formes de mobilisation politique et de participation au débat public, telles que le lobbying « dilué » ou le lobbying « citoyen » (A) avant de consacrer le dernier pan de notre étude au statut particulier du lobbying dans le contexte d’une société à mission ou a minima « à raison d’être » (B).

A. — Les (nouvelles) formes de mobilisation politique et de participation au débat public 

1. — La pratique de l’« astroturfing »

Le terme « astroturfing » est né en 1986 par le sénateur du Texas Lloyd M.Bentsen afin de décrire une campagne de relations publiques conduite par une entreprise, visant à simuler l’opinion de citoyens.

En effet, selon lui, de nombreux coursiers qui lui étaient envoyés par des citoyens faisaient en fait partie d’une campagne de lobbying initiée par une compagnie d’assurance. Désigné comme étant une « désinformation populaire planifiée », ce concept consiste à simuler un mouvement populaire spontané à des fins publicitaires ou politiques. Elle désigne ainsi une simulation d’un mouvement citoyen afin de justifier une prise de position. Cette méthode peut également être pratiquée en manipulant les algorithmes utilisés par les médias sociaux ou les moteurs de recherche[1].

L’objectif des campagnes « d’astroturfing » est de véhiculer, dans le débat public, un message ou une position, qui converge avec la parole de l’industrie, en le diffusant comme étant spontané et désintéressée, dissimulant son côté commandité, et en donnant l’apparence qu’il émane de consommateurs ou citoyens. Comme le souligne le sociologue Sylvain Laurens, si elle est découverte, la manœuvre perd tout intérêt pour les commanditaires qui apparaissent alors sous un jour peu favorable, mais, si elle fonctionne, elle donne le sentiment que des citoyens soutiennent une position ferme et dissonante dans un débat public déjà constitué [2].

 Cette technique se réalise à travers une multitude de moyens de communication (réseaux sociaux, création d’un faux groupe d’intérêts, documents imprimés), et dans plusieurs domaines, notamment la politique, la diplomatie d’influence et le domaine économique. Elle est, comme le souligne Sharon Beder, le plus souvent porté par une firme multinationale ou des fédérations patronales, avec l’aide logistique d’une agence de relations publiques[3].

Peu de travaux portent sur ce phénomène, sous l’angle de la représentation d’intérêt, ce sujet ayant majoritairement été traité par des praticiens du marketing[4]. Analyser le développement de cette pratique présente pourtant un véritable intérêt pour les sciences sociales, notamment si l’on cherche à rendre compte des évolutions du répertoire d’action collective des milieux d’affaires.

Alors que la représentation d’intérêt est bien souvent réduite médiatiquement à un travail de persuasion mené discrètement auprès d’élus par des conseillers « de l’ombre » (cf infra II), une enquête sur cette pratique permet de saisir les contraintes qui pèsent sur les représentants d’intérêts économiques dès lors que ces derniers opèrent en marge des formes plus classiques et discrètes d’organisation collective (business associations, think tanks, fondations philanthropiques).

L’ « astroturfing », illustrée dans des œuvres de fictions récentes, notamment dans le film « Promised Land »[5], dans lequel le personnage principal s’oppose à un activiste écologiste aux méthodes contre-productives avant de se rendre compte que celui-ci est payé par sa propre firme pour décrédibiliser l’opposition au gaz de schiste, s’illustre en réalité à différents échelons, sous différentes formes, pratiques et cibles.

A l’international, cette pratique a été médiatisée, sans même savoir qu’il s’agissait d’ « astroturfing » avec le Sommet de la Terre de Johannesburg en août 2002 où les chaînes d’information continue et la plupart des grands quotidiens nationaux ont couvert une manifestation de paysans indiens, philippins et africains, qui arboraient des pancartes à contre-courant des mots d’ordre écologistes du sommet : « Say no to Eco-imperialism », « Greens : stop hurting the poors », « Biotechnology for Africa ». Le mouvement fut présenté comme une première par beaucoup de commentateurs qui parlèrent alors de prise de parole fondatrice des « agriculteurs des pays en voie de développement ». Quelque temps après le sommet, plusieurs ONG écologistes s’étonnèrent cependant des capacités de mobilisation de ces fermiers présentés comme sans ressources mais issus de plusieurs pays et de plusieurs continents. Après une enquête menée par l’activiste Jonathan Matthews, il s’avéra que la manifestation en question réunissait les plus grands propriétaires de ces différents pays et que l’ensemble de l’opération était financée par les entreprises produisant des semences génétiquement modifiées dont Monsanto[6].

Au niveau européen, on peut retrouver l’origine de cette pratique avec les consultations publiques de l’exécutif européen. En effet, c’est parce que la Commission européenne valorise un mode de participation fondé sur l’expertise et la consultation des groupes d’intérêt que ce type de phénomène a pu prendre corps à Bruxelles en donnant la possibilité aux représentants d’intérêts d’intervenir sous plusieurs casquettes, et de court-circuiter l’idée de médiation inhérente à la catégorie de « société civile européenne »[7]. L’évolution de l’eurocratie et des modes de légitimation des institutions européennes[8] explique l’émergence de ce phénomène. En effet, du fait que les intérêts économiques avaient été les premiers, et pendant longtemps les seuls, à prendre la parole à Bruxelles[9], l’expertise des industries étant la pierre angulaire des politiques publiques européennes lors de la mise en œuvre de la communauté européenne du charbon et de l’acier ; les agents de l’Union européenne ont peu à peu cherché à faire émerger une prise de parole des citoyens à côté de celle des représentants des industriels. La Commission a ainsi favorisé la création d’un Bureau européen des consommateurs (le BEUC) et promeut régulièrement la constitution au niveau européen d’ONG d’expertise spécifique.

A partir des années 1990, les ONG apparaissent comme un tiers-acteur entre la Commission et les intérêts économiques[10]. La multiplication des consultations publiques et la possibilité pour les groupes d’intérêt de se voir définis en tant que stakeholders participent d’un système décisionnel où la légitimité de l’action publique repose sur la mise en balance des intérêts dits « économiques » et des intérêts dits « citoyens »[11]. Comme le souligne le sociologue Sylvain Laurens, à Bruxelles, cette structuration polaire place d’emblée l’industrie dans une position forte en ce qu’elle dispose du monopole de la prise de parole « au nom de l’entreprise » et de l’économie[12], tout en étant l’objet même de la régulation des marchés. Par un jeu d’agrégations successives, les fédérations patronales européennes représentent non seulement les entrepreneurs mais aussi les entreprises, voire toute l’économie d’un secteur. Ainsi, cette mise en balance de l’économique contre le citoyen prive l’industrie de toute légitimité à évoquer d’autres registres relevant de l’intérêt général (cf supra IV.A.3).

« L’astroturfing » offre dès lors des possibilités que n’offrent pas un think tank, une expertise scientifique ou la philanthropie en produisant, selon le sociologue Sylvain Laurens, la croyance en la possibilité de parler au nom des citoyens « ordinaires », il propose potentiellement une légitimité « par en bas », laquelle est souvent recherchée par les fonctionnaires de l’UE mais pas toujours présente dans les instances consultatives[13]. La pratique naît ainsi au croisement de la double attention portée par la Commission européenne aux questions environnementales, d’une part et à « la parole des consommateurs », d’autre part. Cette pratique peut être utile notamment dans le cas, très fréquent dans la bulle européenne, d’une industrie s’opposant non pas à des ONG mais à une autre industrie, exemple fait à Bruxelles entre les industries du verre et celles du plastique, notamment dans le cadre des discussions de la directive plastique à usage unique[14] ou encore celles du nouveau plan d’action pour l’économie circulaire[15] au sein du Pacte vert pour l’Europe[16].

Dès lors, la configuration institutionnelle bruxelloise ouvre la possibilité pour un groupe d’intérêt économique de promouvoir l’activité de production industrielle de ses membres à travers les catégories d’action publique consultative et écologique. Souvent issus de formations proches, les représentants en public affairs de ce type de représentation d’intérêts ont des profils comparables aux consultants en communication avec lesquels ils travaillent. Le sociologue Sylvain Laurens souligne ainsi que cette proximité sociologique offre un terrain propice à la diffusion des attentes de l’industrie dans le secteur des relations publiques qui, en retour, propose des produits de plus en plus standardisés promouvant l’utilisation des réseaux sociaux à des fins commerciales[17].

Les cas « d’astroturfing » sont ainsi nombreux à Bruxelles sur les sujets environnementaux. Nous pouvons notamment évoquer l’exemple du Nuclear Forum qui, en 2010, lançait des campagnes de communication sur Bruxelles afin « d’informer le citoyen sur l’avenir énergétique de la Belgique et en particulier sur l’énergie nucléaire et ses applications ». Le Nuclear Forum est une association sans but lucratif de droit belge, et ce n’est qu’en cliquant sur les liens de contacts en pied de page du site que l’on découvre que l’association est financée par Areva, EDF et six autres entreprises du secteur nucléaire.

La pratique a été récemment critiquée par Ali Tabrizi, cinéaste anglais, dans son reportage « Seaspiracy » diffusé sur la plateforme Netflix[18] en mars 2021, concernant les positions et messages de certaines associations environnementales à l’échelon européen et international, qui n’adopteraient pas une position tranchée sur les pratiques de pêches industrielles, pour dénoncer d’autres impacts environnementaux sur les milieux marins, notamment ceux des plastiques, du fait du financement de ces structures par des professionnels de la pêche[19].

En France, Sylvain Laurens souligne que le phénomène est encore peu traité par les militants ou les médias mais les rares cas recensés l’ont été en marge de consultations publiques d’envergure. En mai 2012, Médiapart a ainsi révélé, après le sommet de Grenelle 2, le lancement par EDF et plusieurs industriels de l’énergie d’une ONG baptisée « Équilibre des énergies » qui se donne pour objectif d’« investir le champ médiatique par ses différentes prises de position », de se mettre « au service de l’intérêt général avec la volonté de redonner aux consommateurs un rôle majeur » en intervenant sur « l’impact réel du Grenelle 2 sur le coût du logement social » et sur « la réalité des taux d’émission de CO2 au regard de chaque énergie déployée ». Pour l’après-sommet, le projet prévoit une « phase commando » où des « lobbyistes » devront prendre rendez-vous avec des ministres et leurs conseillers, l’ONG visant à devenir une référence sur « tous les sujets relatifs au consommateur vis-à-vis du logement et des énergies/environnement »[20].

Ainsi, l’émergence d’une parole convergente avec les entreprises mais dont les traits prennent la forme d’un mouvement de citoyens, la pratique de « l’astroturfing » laisse entrevoir la possibilité pour les firmes d’étendre au champ médiatique « grand public » les luttes symboliques qui les opposent au sein de leur propre secteur ou entre différents secteurs de production. En cela, tel que le souligne le sociologue Sylvain Laurens, « l’astroturfing » est peut-être le symptôme d’une transformation plus fondamentale des formes contemporaines de représentation des intérêts économiques[21], auprès de différentes cibles que sont les pouvoirs publics, l’opinion publique, les consommateurs, les professionnels des médias ou encore les experts des sujets évoqués[22].

Si ces débuts peuvent sembler « artisanaux » et encore accessibles à un dévoilement par la sphère militante, il est probable que l’investissement financier que les plus grosses firmes consentent par exemple dans l’utilisation à des fins commerciales des réseaux sociaux favorisera rapidement l’apparition de nouvelles techniques mimant de façon encore plus élaborée l’activisme militant des ONG classiques. Si cette pratique peut poser question du point de vue démocratique, l’évaluation des effets réels ou supposés de « l’astroturfing » sur la définition des politiques publiques reste aujourd’hui en débat.

2. — L’émergence et l’institutionnalisation d’un lobbying citoyen ?

Les citoyens ont une réelle attente à l’égard de l’ouverture du Parlement à la société civile. Ils souhaitent ainsi davantage participer au dialogue et à la négociation lors du processus législatif. Ce principe est d’ailleurs inscrit à l’article VI de la Déclaration des droits de l’Hommes et du citoyen de 1789 : « La loi est l’expression de la volonté générale. Tous les citoyens ont droit de concourir personnellement, ou par leurs représentants, à sa formation ». Cette requête légitime est plus facilement permise aujourd’hui grâce aux outils numériques plaçant le Parlement « sous l’œil constant du citoyen ».

La puissance mobilisatrice des réseaux sociaux permet de faciliter l’échange et l’interpellation des décideurs publics. Les organes institutionnels ne constituent pas les seuls organes régulateurs de l’activité du personnel politique, ils ne se limitent pas aux associations professionnelles ; la question de la représentation d’intérêts est dès lors saisie par les citoyens eux-mêmes. A ce titre, le collectif « Regard Citoyens », association « constituée de citoyens de tous âges et régions, tous bénévoles » porte l’objectif de rendre l’information sur les décideurs publics et les institutions françaises accessibles et transparentes auprès des citoyens[23].

De plus, la demande de participation au processus législatif et de contribution aux politiques publiques sont désormais des revendications de plus en plus présentes chez les citoyens, en plus des acteurs économiques, associatifs, sociaux voire religieux.

Ainsi, les outils institutionnels se sont de plus en plus ouverts et diversifiés pour donner plus la parole aux citoyens. Parce que les politiques publiques à Bruxelles reposent plus qu’à Washington sur l’expertise tierce[24], les citoyens ont l’occasion de répondre à plus d’une centaine de consultations publiques de la Commission européenne par an (cf supra IV.A.1), au même titre que les autres acteurs de la représentation d’intérêts, apportant dès lors une légitimité publique et démocratique aux grandes orientations des politiques publiques. Il en est de même en France sur la consultation de plans nationaux tel que le plan national santé environnement (PNSE)[25], stratégies nationales telle que la stratégie nationale pour la biodiversité 2030[26], feuille de route telle que la feuille de route pour l’économie circulaire (FREC)[27] ou encore les textes d’applications des lois, donnant l’opportunité au grand public de donner son avis sur les grandes orientations législatives et réglementaires environnementales françaises. Tel est le cas également des initiatives citoyennes institutionnalisées, notamment l’initiative citoyenne européenne, mise en place en 2011, permettant à un million de citoyens européens d’appeler la Commission européenne à légiférer sur un sujet donné[28].

Le droit de pétition est quant à lui reconnu à l’échelon européen, en vertu de l’article 227 du Traité sur le Fonctionnement de l’Union européenne[29], donnant la possibilité, à titre individuel ou en association avec d’autres citoyens ou personnes, d’adresser une pétition au Parlement européen sur un sujet relevant des domaines d’activité de l’Union et qui le ou la concerne directement. Ce droit de pétition est également favorisé à l’échelon national, tant du côté de l’Assemblée nationale que du Sénat. Ainsi, du côté de l’Assemblée nationale, toute personne majeure, de nationalité française ou résidant régulièrement en France, peut déposer ou signer une pétition sur la plateforme des pétitions de l’Assemblée nationale[30]. Les pétitions peuvent ainsi faire l’objet d’un débat en commission, auquel sont éventuellement associés les premiers signataires. De plus, sur proposition d’un président de commission ou d’un président de groupe, les pétitions recueillant plus de 500 000 signatures peuvent être débattues en séance publique.

Du côté du Sénat, la plateforme e-pétitions permet de déposer une pétition ou de soutenir une pétition déjà publiée. Ces pétitions permettent, si plusieurs conditions sont réunies, de pouvoir saisir le Sénat d’une demande d’inscription à l’ordre du jour d’un texte législatif ou de création d’une mission de contrôle sénatoriale. Les pétitions ayant recueilli au moins 100 000 signatures dans un délai de 6 mois sont transmises à la conférence des présidents[31]. A noter que tant côté Assemblée Nationale que Sénat, aucune pétition n’a atteint le seuil pour être transmise. Les plateformes étant liées à une identification de citoyens, donc de personnes physiques, il est difficile de pouvoir analyser les données et comprendre quelles organisations pourraient être à la manœuvre de certaines pétitions.  LE seul exemple pourrait être celui d’une pétition anti-vènerie qui dit « s’associer à la démarche de la Fondation 30 Millions d’Amis »[32]

Quand bien même ces nouveaux outils permettent de répondre à cette demande citoyenne d’intégration au processus législatif, force est de l’insuffisance de certains dispositifs, comme celui des consultations publiques, l’échec d’autres, tel que l’initiative citoyenne européenne du fait de la complexité du processus et des conséquences politiques et juridiques de ces initiatives.

Parce que les citoyens souhaitent porter plus fort leurs voix dans le débat public, ils s’organisent désormais seuls ou avec des pairs, pour interpeller les décideurs publics par des actions de revendications, des rencontres avec des élus, des interpellations de responsables publics sur les réseaux sociaux, des pétitions ou encore des tribunes, allant dès lors plus loin que les outils de consultations publiques, d’initiatives citoyennes ou de pétitions institutionnalisées énoncées supra.

En effet, les citoyens forment désormais des groupes ayant vocation à défendre de nouveaux enjeux (cause animale, environnement, ect), signe que l’Etat n’est plus le seul à se positionner comme acteur principal et « pertinent des politiques publiques et de la promotion de l’intérêt général[33] ». Cette mutation de la vie politique donne lieu à une multiplication des groupes d’intérêt de toute nature souhaitant à leur tour davantage participer à l’élaboration des politiques publiques. Dès lors, la représentation d’intérêt ne peut être réduite à un « banal instrument de légitimation des dominants[34] » puisque la gouvernance est désormais le fruit de multiples acteurs non étatiques interagissant de manière formelle mais également informelle dans l’optique de discuter mais surtout de mettre en place une politique.

Doit-on considérer que ces voix représentent une carence du contrat social lié avec l’élu ? Un nouveau type de suffrage ? Ou la continuité d’un esprit révolutionnaire façonnant notre continent depuis la fin du XVIIIème siècle ?

Cette pratique connaît aujourd’hui de nombreux exemples sur les enjeux sociétaux et environnementaux tels que le mouvement des pigeons, nuit debout, « zone à défendre », gilets jaunes, les marches pour le climat, exigeant des réponses et contributions tant des décideurs publics que des représentants d’intérêts.

Ce phénomène se rapproche de la notion anglo-saxonne de « citizen lobbying », expression que nous pourrions traduire par « lobbying citoyen » dont l’usage fait débat en France, comme le note Justine Canonne, journaliste scientifique[35]. En effet, certains acteurs revendiquent cette notion, tel que le collectif citoyen lobbyiste d’intérêt commun (CLIC)[36] qui définit le lobbying citoyen comme « un ensemble d’actions visant à influencer la décision publique en faveur de l’intérêt commun »[37]. Ce collectif se donne pour objectif d’accompagner les mobilisations citoyennes pour les rendre plus efficaces, en proposant des formations et des outils pédagogiques pour mieux comprendre comment se fabrique la loi, suivre le calendrier parlementaire, interpeller un élu ou organiser une veille sur un sujet défendu. De l’autre côté, l’association française VoxPublic définit son action comme du « contre-lobbying citoyen », partant du principe que les responsables politiques n’assument pas leur rôle de représentation de l’intérêt commun comme ils le devraient, ses membres aident les initiatives émanant de la société civile à se faire entendre, afin de remettre les citoyens au centre du processus décisionnel.[38]

Ce « lobbying citoyen » s’institutionnalise progressivement depuis les marches pour le climat, la constitution de « Notre affaire à tous » (cf supra III.A & B) en créant des synergies individuelles et collectives, structurées sur le long terme, pour influencer les décisions politiques environnementales.

Il se constitue même par des points physiques où se partagent et se diffusent les idées et les bénévoles pour mobiliser, (in)former, agir et « passer à la vitesse supérieur » comme « La base » à Paris, imaginée par dix associations regroupées pour passer à l’étape supérieure, celle de la « mobilisation permanente » en mars 2019, La base regroupe aujourd’hui des centaines d’organisations pour partager « sa vision d’un monde plus juste, plus solidaire et plus durable ».[39]

Il peut également être soutenu par des grandes structures existantes, telle que l’ONG Greenpeace qui relaie l’initiative « the political Lobbying Network » composé de « volontaires à travers le pays faisant pression sur leurs politiciens locaux pour leur parler des problèmes environnementaux et promouvoir les solutions préconisées par Greenpeace »[40].

Le « lobbying citoyen » connaît aujourd’hui une tendance forte avec des mouvements qui, en allant plus loin que les revendications citoyennes par des marches ou « sitting » va jusqu’à s’incarner par de la « désobéissance civile »[41]. Celle-ci implique la défense d’un intérêt qui dépasse l’intérêt strictement individuel de celui qui la pratique, « en tirant sa légitimité du fait qu’elle affirme défendre justement l’intérêt général contre des pratiques, une politique, des lois qui le contrediraient[42]. Ces actes de désobéissance civile rappellent les actions des militants d’Act Up, des féministes pour le droit à l’avortement, ou encore celle de Rosa Parks qui, dans les années 1950 aux États-Unis

En France, les actions de désobéissance civile, notamment sur les questions environnementales sont de plus en plus nombreuses depuis la COP21. Tel est l’exemple des « faucheurs de chaises », regroupant des militants d’ONG, d’associations, qui s’étaient fait connaître au moment de la COP 21 en volant des chaises dans des agences bancaires pour dénoncer l’évasion fiscale, au détriment du financement de la lutte contre le changement climatique, et qui ont depuis continué à perpétrer leurs actions[43]. C’est également le cas des « décrocheurs de portraits d’Emmanuel Macron » dans les bâtiments publics, pour alerter sur l’inaction du gouvernement face à l’urgence climatique, qui ont été poursuivis et relaxés pour certains au nom de la liberté d’expression[44].

Si ces pratiques n’étaient auparavant que peu institutionnalisées et portées à titre individuel ou au sein de collectifs éphémères, tel est par exemple le cas des « faucheurs volontaires d’OGM »[45], elles se revendiquent désormais au titre d’une mobilisation plus permanente et structurée via des associations et des actions planifiées sur le long terme ; à titre d’illustrations, sous différentes formes et structures mobilisatrices à Notre-Dame-des Landes, sur le site de Burre ou encore dans le Triangle de Gonesse. De plus, si les luttes environnementales portées par les citoyens pouvaient être clivantes entre citoyens eux-mêmes auparavant, tel est l’exemple des faucheurs volontaires d’OGM, à la fin des années 2000, avec un clivage important entre faucheurs et agriculteurs, elles semblent aujourd’hui plus consensuelles entre citoyens pour gagner en force de frappe auprès des décideurs publics. Tel est également le cas d’étude, en 2021, de l’alliance entre associations environnementales, telles que Greenpeace, Les Amis de la terre, Attac et la Confédération paysanne, et les raffineurs de Total, mobilisées pour décortiquer le contenu du projet Galaxie de reconversion du site de Grandpuits qui prévoit la fin des activités de raffinage pour fin 2023, tant par des actions territoriales[46] qu’au siège même de l’entreprise.[47]

L’institutionnalisation du lobbying citoyen est en passe même de se politiser, pour porter la mobilisation citoyenne et les revendications individuelles, notamment sur les enjeux environnementaux, grâce à la mutation du citoyen en décideur public. Tel est l’objectif de l’association « Tous élus » qui part du constat que les derniers épisodes de revendications citoyennes tels que les gilets jaunes, les bonnets rouges, le collectif « nuit debout » ou encore la montée de l’abstentionnisme exige une réponse citoyenne face à « une démocratie à bout de souffle, boudée par une part grandissante de la population et notamment les jeunes et les plus modestes »[48]. Cette association a ainsi lancé un programme sélectif de formation en ligne « Pourquoi pas toi ? » afin d’accompagner un mouvement citoyen pour diversifier les bancs de l’Assemblée nationale et œuvrer pour « plus de justice sociale, plus de justice environnementale et une démocratie exemplaire »[49]. C’est également l’ambition de la « primaire populaire » organisée par un collectif de citoyens et citoyennes, co-présidée par Mathilde Imer, militante écologiste et membre du comité de gouvernance de la Convention Citoyenne pour le Climat  et Camile Marguin de l’association « Tous élus », qui permettra de « désigner une seule candidature de rassemblement gagnante pour 2022 sur la base d’un projet écologique, démocratique et social »[50]

Ainsi, ces individus et organisations citoyennes souvent considérées en dehors du champ politique s’attribuent les codes de la représentation d’intérêts, notamment en interagissant de plus en plus avec les pouvoirs publics et s’accordent à dire qu’elles défendent des causes en faveur de l’intérêt général. L’usage de nouvelles formes de protestation et l’adoption de pratiques plus professionnelles favorisent l’expansion de ces nouvelles formes de représentation d’intérêts. Ainsi, ces nouvelles représentations d’intérêts mettent en exergue l’idée qu’elles instaurent « une nouvelle pièce dans l’organisation morale de la société, dans son code du bien et du mal »[51] venant de facto rebattre les cartes du plaidoyer et du lobbying.

3. — Les nouvelles formes et outils de « confiscation de l’intérêt général »

Si l’intérêt général a majoritairement été capté par les associations environnementales et ONG (cf supra I.B.1), les entreprises privées prennent aujourd’hui le pas d’une ouverture au débat public et entrent dans l’Agora pour conjuguer intérêts privés et intérêt général, dans une démarche plus transparente et constructive que la pratique « d’astroturfing » (cf supra IV.A.1). En effet, passer d’une influence difficile à contrôler par la société civile à une démarche de conviction des citoyens et des consommateurs par l’entreprise privée permet aujourd’hui de se poser la question des moyens et outils rebattant les cartes d’un lobbying et d’un plaidoyer dans une arène publique où les frontières entre intérêt général et intérêts privés sont mouvantes.

En effet, comme l’affirme une ancienne responsable environnement d’une fédération française, devenue responsable plaidoyer sur les sujets industriels d’une association environnementale « les associations environnementales ont un poids supplémentaire et d’avantage d’outils à disposition car elles ont la société civile, les citoyens de leur côté, elles ont donc un avantage comparatif par rapport aux autres représentants d’intérêts ; là où les acteurs privés ont un historique, des entrées plus faciles, et une force de frappe différente[52]. De plus, il y aurait selon elle « une inquiétude des acteurs privés à exprimer publiquement certains points sans validation de la société civile »[53]

Si la représentation d’intérêts, qu’elle soit exprimée par du plaidoyer ou du lobbying, est une forme alternative ou complémentaire à la démocratie, elle n’en est pas antagoniste. D’où l’intérêt aujourd’hui pour les entreprises privées, de changer les pratiques de la représentation d’intérêt, utilisant de nouveaux outils et moyens pour comprendre et intégrer les attentes des citoyens et consommateurs.

Dans un contexte où les nouveaux outils de communication, dont les réseaux sociaux, permettent aujourd’hui aux citoyens d’interroger les entreprises dans toutes les dimensions de leurs activités, et pas uniquement leurs cœurs de métiers ; les entreprises doivent passer par l’action, puis la communication, et non l’inverse, pour démontrer l’authenticité et l’impact de leurs engagements sociétaux et environnementaux. Ceci permettant derrière de faire émerger une nouvelle catégorie de citoyen-consommateur que sont les « buycotters » qui adhèrent de manière positive à une marque réputée éthique, selon Laura Visserias, anciennement vice-présidente de l’expertise corporate, crise et affaires publiques de Weber Shandwick et actuelle directrice des affaires publiques d’Air Liquide[54].

Selon cette dernière, la crise de défiance envers les experts et les politiques a également déplacé les attentes vers les entreprises[55]. Ces attentes sont d’autant plus renforcées par l’engagement des jeunes générations, le contexte politique et la sortie de crise sanitaire et économique dû à la Covid-19. En effet, les jeunes générations sur le marché du travail souhaitent remettre du sens et être fier de leurs employeurs, notamment pour des valeurs telles que la protection de l’environnement[56].

Ces attentes sur le marché du marché s’inscrivent également dans un contexte politique où la préoccupation environnementale se classe loin devant les autres thématiques chez les 18-30 ans, arrivant dans le top cinq des sujets prioritaires pour plus d’un jeune sur deux[57]. Une dynamique d’engagement sociétal et environnemental des jeunes générations qui s’expriment également par l’envie d’intégrer des associations environnementales, des ONG, des acteurs de l’économie sociale et solidaire ou encore des sociétés à mission (cf infra IV.B), avec la volonté de redorer la représentation d’intérêts.[58]

Dès lors, pour porter un discours d’intérêt général et répondre aux attentes des citoyens, notamment sur les enjeux environnementaux, ces dernières peuvent s’engager ensemble, mettre en œuvre des pactes ou encore interagir avec le public par le biais des évènements, de communications ou encore de consultations pour mettre au défi leurs engagements et actions.

Tel est le cas de BNP Paribas Asset Management qui s’est associé à la coalition Climate Action 100+[59] ; ou encore des entreprises de l’agroalimentaire et du secteur du commerce et de la distribution qui se sont engagées via des pactes, au côté des ONG et associations environnementales pour apporter une légitimité et un suivi des engagements, comme pour le pacte national sur les emballages plastiques[60] et le pacte sur les dates de consommation pour réduire le gaspillage alimentaire[61].

Elles peuvent également faire comprendre les enjeux industriels et environnementaux, dans une démarche co-constructive et transverse, en ne s’adressant plus uniquement à leurs clients, mais aussi au grand public, comme la Fédération des industries mécaniques (FIM) avec le concept de « l’usine extraordinaire », présenté au Grand Palais à Paris 2018[62]. Les syndicats ont également suivi cette démarche d’ouverture au débat public, tel a été le sens de la démarche du MEDEF en 2020 avec ses universités d’été à l’hippodrome de Longchamp, conviant des militants écologistes pour passer d’une discussion de l’entre-soi à un débat ouvert.

Cette ouverture au débat public peut également être structurel sur l’organisation des affaires publiques et son champ d’application (cf supra II.A.1), tel a été le sens de la démarche de Schneider Electric par exemple, qui a fait le choix de nommer son directeur développement durable de longue date, Gilles Vermot Desroches en tant que directeur de la citoyenneté en Mai 2021. Connue pour son engagement associatif en tant qu’ancien président du mouvement Scouts et Guides de France, et son engagement syndical au sein des différentes commissions du MEDEF, ce dernier a désormais la mission de conjuguer enjeux environnementaux et engagements citoyens pour son organisation.

On pourrait certes se demander si capter l’intérêt général, n’est-ce pas vouloir chercher à capturer le régulateur pour faire primer un intérêt particulier sur l’intérêt général, engendrant in fine des externalités négatives pour les citoyens, au sens de la théorie de George J.Stigler[63] ? Ce serait oublier que tout opportunisme ou communication sans engagement est aujourd’hui très vite rattrapé par les moyens de communication et d’actions des citoyens-consommateurs et associations environnementales-ONG qui viendraient dénoncer le « greenwashing » (voire le « fair washing » pour les entreprises se dotant d’une raison d’être qui n’est pas réellement transformative) des représentants d’intérêts, assurant dès lors un équilibre des forces dans le jeu du plaidoyer.

C’est dans cette perspective que de nouvelles formes de consultations voient le jour pour intégrer pleinement la voix des citoyens dans le jeu de la prise de décision et des engagements des parties prenantes. Ces nouveaux usages, ces outils classiques que l’on reconnaît pour une catégorie spécifique de représentants d’intérêts (cf supra III.B) que d’autres s’approprient désormais, démontre le floue des frontières entre lobbying et plaidoyer environnemental.

A ce titre, les associations environnementales et ONG, habituées des outils de consultations de type pétitions dans leurs démarches de plaidoyer, voient maintenant d’autres représentants d’intérêts les utiliser. Un exemple de cette démarche se retrouve avec « Des Clics de Conscience » et la pétition #YesWeGraine visant à préserver les semences paysannes et sa traduction en amendements lors du débat pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages. « D’espoirs en désillusions, des potagers à la COP21, du Mexique au Sénat, Des Clics de Conscience fait germer le désir d’une reconquête démocratique »[64] et a pu analyser l’effet concret de ces pétitions sur le régulateur. Dans une logique moins de capture du régulateur que de captation de l’intérêt général, « Make.org »[65] s’est donné pour mission d’engager la société civile dans la transformation positive de la société, auprès d’entreprises privées, pour mieux comprendre les attentes des citoyens. Par une action collective des citoyens, des associations, des entreprises, des institutions et des médias en faveur du bien commun, Make.org se donne pour objectif d’aider à retracer les lignes d’un socle partagé « grâce auquel notre démocratie et nos institutions redeviendront durables »[66].

Ainsi, convaincu que les changements ne peuvent se construire que sur desconsensus populaires, Make.org a lancé avec ses partenaires une vaste consultation citoyenne sur l’environnement, point de départ de sa Grande Cause Agissons Ensemble pour l’Environnement. D’une première phase de consultation massive entre novembre 2019 et février 2020, des milliers de citoyens ont pu répondre à la question « Comment agir ensemble dès maintenant pour l’environnement ? » en proposant leurs solutions et en votant sur celles des autres[67]. De cette première phase de consultation, incluant des sociétés privées de l’énergie, du vestimentaire ou de la distribution, et des médias, doit découler une seconde phase de collaborations pour sélectionner les actions cibles, puis une troisième phase d’actions, de mise en œuvre des actions concrètes pour catalyser des impacts positifs systémiques et déterminants.

Nous pouvons également penser à l’initiative de la Convention 21, qui, dans une même logique que la Convention Citoyenne pour le Climat, offrira l’opportunité aux représentants de 150 entreprises françaises tirées au sort de formuler leurs recommandations pour décarboner l’économie, régénérer la biosphère et mettre en œuvre une économie compatible avec les limites planétaires[68].

Ces nouveaux outils et usages font également émerger des nouvelles organisations dont l’objectif est de promouvoir une représentation d’intérêt plus ouverte et transparente pour les acteurs privés, et une expertise affaires publiques plus technique pour les acteurs associatifs et ONG. Tel est le cas de « The Good Lobby » dont l’originalité du modèle tient dans l’application des principes de l’économie collaborative à un domaine d’ordinaire largement opaque pour le regard public, en identifiant d’un côté les besoins des lobbies intéressés, principalement des ONG – et les bénévoles de l’autre qui peuvent y répondre. Ces derniers sont, proclame le site de l’organisation « certains des universitaires, juristes, professionnels du secteur privé et étudiants les plus brillants d’Europe »[69].

Avec une vocation de pro-bono de lobbyistes bénévoles, au service d’ONG et d’acteurs de l’économie sociale et solidaire pour professionnaliser les techniques de la représentation d’intérêts pour des petits acteurs qui souhaitent également faire porter leurs voix dans le débat parlementaire, en plus des outils classiques de plaidoyer dont ils ont déjà l’usage. Après une première implémentation à Bruxelles et Milan, « The Good Lobby » porte désormais ses ambitions en France à Paris, avec le philantro-lab[70], porté par le cabinet Koz. Ce même cabinet se défend d’accompagner les entreprises dans leurs affaires publiques et leur plaidoyer pour « créer de la confiance afin que les solutions à faire remonter dans le débat public soient des solutions durables, pleinement tournées sur la confiance des citoyens »[71].

Les ONG et les associations s’opposent bien souvent aux pratiques du lobbying mais force est de constater qu’elles en utilisent parfois les méthodes et les pratiques. En effet, les associations environnementales et les ONG peuvent livrer aux pouvoirs publics une véritable expertise et « sur nombre de sujets techniques, certaines ONG disposent d’une expertise indispensable à un débat bien informé et à l’exercice d’un contre-pouvoir performant[72] ». Elles disposent d’une vive capacité mobilisatrice de l’opinion publique à travers leurs différentes actions de plaidoyer, elles ont, de plus, un vrai levier technique de lobbying à mettre en avant. C’est ce second souffle dans la représentation d’intérêts des associations environnementales et ONG qui est aujourd’hui portée par des associations comme Greenlobby[73] ou des cabinets de conseils en affaires publiques, tel que Ecolobby[74]. La première structure, se donne pour ambition de « répondre au déficit d’influence des citoyen.ne.s dans la fabrication de la loi face aux lobbyistes des grandes multinationales »[75] afin de « les soutenir et renforcer leur voix pour changer la loi»[76]. Quant à la seconde structure :

« [Elle] a été créée par un ancien collaborateur parlementaire qui défend l’idée selon laquelle les associations font aujourd’hui du lobbying et doivent pouvoir être accompagnée, et se professionnaliser sur cette partie des affaires publiques par des techniques de lobbying proche des autres représentants d’intérêts, en complément de leur plaidoyer. »[77]

Ces nouvelles formes et moyens de captation de l’intérêt général permettent de se questionner sur le modèle de l’entreprise à mission, en tant qu’organisation privée singulière dans la représentation d’intérêts, transitant d’un lobbying égocencentré à un lobbying engagé.

B. — Société à mission ou à raison d’être : du lobbying au plaidoyer d’entreprise ?

Il est un cas particulier que nous souhaitions traiter à travers le nouveau rôle des entreprises que la loi PACTE a reconnu par trois innovations du droit des sociétés (avec les dispositions nouvelles soulignées) :

  • « La société est gérée dans son intérêt social, en prenant en considération les enjeux sociaux et environnementaux de son activité. »[78]
  • « Les statuts doivent être établis par écrit. Ils déterminent, outre les apports de chaque associé, la forme, l’objet, l’appellation, le siège social, le capital social, la durée de la société et les modalités de son fonctionnement. Les statuts peuvent préciser une raison d’être, constituée des principes dont la société se dote et pour le respect desquels elle entend affecter des moyens dans la réalisation de son activité. »[79]
  • « Une société peut faire publiquement état de la qualité de société à mission […]. »[80]

À ce titre, un exemple d’entreprise nous semble particulièrement intéressant : Danone. Créée en 1919, les premiers yaourts de la marque sont produits à partir de ferments de l’Institut Pasteur et distribués en pharmacies. Danone revendique depuis ses origines[81] l’ambition d’« apporter la santé par l’alimentation au plus grand nombre. » Cette ambition est devenue formellement la raison d’être (au sens de l’article 1835 du code civil) du groupe en 2020 après son inscription aux statuts par l’assemblée générale.[82]

Le point de départ de la démarche d’engagement du groupe est communément daté en 1972 lorsqu’Antoine Riboud déclara : « Il n’y a qu’une seule terre, on ne vit qu’une seule fois. » Il s’agit d’une première référence au développement durable, avant que le concept ne soit précisé comme la somme d’un « développement économiquement efficace, socialement équitable et environnementalement durable ».[83]

De cette conviction de l’ancien PDG à la loi PACTE, nous observons l’évolution du rôle des entreprises tandis que Danone conforte progressivement ce positionnement. Cela d’autant plus que dans les années 1970, l’heure est plutôt au triomphe du capitalisme actionnarial et de la rentabilité à court terme de l’entreprise.

Entre 1972 et 2020, il est possible de distinguer trois phases dans ce positionnement de Danone. Une première période, où la singularité de ce positionnement de l’entreprise de l’agroalimentaire contribue à affirmer son rôle dans la société et sa particularité sur le marché agroalimentaire français, européen et bientôt mondial. L’entreprise a pris soin de concentrer ses activités sur le produit notamment en réduisant la part des activités liées à la production d’emballages et en cédant celles liés à l’alcool. Puis, progressivement au cours des années 2000, Danone est allé plus loin. Dès 2005, son engagement prend la forme d’un véritable plaidoyer en formalisant ce qui est devenu officiellement sa raison d’être : « apporter la santé par l’alimentation. » Un plaidoyer incarné à partir de 2014 par le duo Franck Riboud[84] (président)-Emmanuel Faber (directeur général). Ce dernier deviendra P-DG en 2017 et réputé proche de la nouvelle majorité présidentielle.

La conjonction d’un plaidoyer (cause formalisée, expression d’une ambition pouvant revêtir un caractère politique), de l’incarnation (à travers un porte-parolat identifié et audible) et d’une ouverture politique (policy window créée avec l’élection d’Emmanuel Macron à l’Élysée et de La République en Marche à l’Assemblée nationale)sera le catalyseur pour faire aboutir le plaidoyer lié à ce positionnement.

En janvier 2018, Jean-Dominique Senard et Nicole Notat se voient confier une mission sur le thème de l’entreprise et de l’intérêt général, dont la rédaction fut guidée par deux principes « audace et responsabilité ». Intitulé « L’entreprise, objet d’intérêt collectif »,[85] ce rapport constituera le point de bascule. Car c’est bien ce plaidoyer qui a permis de convaincre les responsables politiques de mettre à l’agenda un projet de loi révisant le rôle formel des entreprises. Le rapport ouvre alors la voie vers un projet de loi, dénommé « PACTE » et vers une procédure législative c’est-à-dire un débat politique institutionnalisé et organisé en vue d’adopter de nouvelles normes pour la société.

D’un militantisme commercial pour une économie en quête d’intérêt social et environnemental et pas seulement économique, le positionnement de Danone est devenu un objet de plaidoyer porté par de nombreux acteurs économiques et syndicats — dont Jean-Dominique Senard, Nicole Notat, Emmanuel Faber ou Pascal Demurger constituent les principaux porte-paroles.

Cet exemple, comme celui de la MAIF, d’Ecosystem, de la CAMIF, de Léa Nature ou encore d’OpenClassromm,[86] démontrent comment l’engagement politique exprimé par un plaidoyer peut être incarné par des acteurs économiques, y compris à but lucratif voire financiarisés.[87] L’histoire de la loi PACTE est en partie celle de l’entrepreneuriat responsable, ni ESS ni philanthropique, mais convaincu que le sens et l’utilité sont des leviers de croissance de long terme. Cela se retrouve dans les toutes premières lignes du rapport Senard-Notat : « les auditions ont confirmé le besoin d’une réflexion sur l’entreprise, dans un contexte de financiarisation de l’économie et de court-termisme de certains investisseurs. »[88]

Il est intéressant de se pencher attentivement sur le phénomène du rôle public et politique des entreprises à mission (ou a minima dotées d’une raison d’être). Ainsi le Groupe Suez, qui a revendiqué sa raison d’être peu après l’adoption de la loi PACTE, a-t-il publié en mars 2021 ses contributions au projet de loi climat et résilience. Un format assumant clairement que le groupe a défendu des propositions d’amendements auprès des parlementaires. Un format adressé au grand public afin de partager les positions défendues par le Groupe. Un format finalement plus proche du plaidoyer que du lobbying en tant que tel : en effet, les mesures proposées y sont formulées dans un registre intelligible et, alliant la clarté à la transparence, le groupe ayant ainsi rendu compréhensible par tous ses amendements. Une démarche originale, tant il aurait été facile de publier des propositions d’amendements rédigées selon les règles légistiques et ainsi de « noyer le poisson ».

Nous faisons le constat que le rôle économique des entreprises évolue avec des attentes fortes de la société sur l’utilité d’une entreprise, ses valeurs et la prise en compte de ses externalités négatives et positives. Un nouveau rôle économique et dans la société qui impose aux entreprises de repenser leurs relations avec les pouvoirs publics.

C. Seconde proposition de kaléidoscope, à la croisée des variables de la représentation d’intérêts

Nous pouvons proposer à ce stade de notre analyse une seconde proposition de kaléidoscope pour illustrer les différences et similitudes du plaidoyer et du lobbying environnemental, en comparaison à notre première proposition de kaléidoscope (cf supra I.B.4). Pour rappel, si l’axe des ordonnées permet de comprendre l’intensité de la distinction entre lobbying et plaidoyer, celui des abscisses permet de mesurer la tension entre intérêts économiques et intérêts sociétaux-environnementaux.

Rappel de la première proposition de kaléidoscope (cf. supra I. B.4.)

Avec la première proposition de kaléidoscope, les cabinets de conseils en affaires publiques et les entreprises privées se retrouvaient dans une zone plus proche du lobbying et des intérêts économiques, tandis que les syndicats, fédérations, organisations patronales et salariales avaient un degré moins important de lobbying pour tendre un peu plus vers le plaidoyer. Les entreprises publiques ou assimilées publiques étaient quant à elles sur le juste milieu des abscisses entre intérêts privés et intérêts sociétaux et environnementaux, avec un degré de lobbying situé entre celui du premier et du second groupe d’acteurs privés. Du côté des associations et ONG, elles se retrouvaient à l’opposé, dans la zone du plaidoyer et des intérêts sociétaux et environnementaux.

Seconde proposition de kaléidoscope et prémices du chapitre dernier « conclusion »

Cette seconde proposition de kaléidoscope permet de reprendre les critères, variables et illustrations exposées précédemment. Si les entreprises privées dites « traditionnelles » se retrouvent dans la zone entre lobbying et plaidoyer, proche des intérêts privés ; l’entreprise à mission se retrouve quant à elle dans la zone entre lobbying et plaidoyer, sur le chemin entre les intérêts économiques et les intérêts sociétaux-environnementaux. Du côté des entreprises publiques « traditionnelles », ces dernières se retrouvent plus proches du plaidoyer qu’auparavant en étant dans un juste milieu entre lobbying et plaidoyer, plus proche des intérêts privés que des intérêts environnementaux-sociétaux en comparaison à la première proposition, du fait que celles adoptant une raison d’être (statutaire ou non) voire la qualité de société à mission[89] retrouvent cet équilibre vers les intérêts sociétaux et environnementaux.

En comparaison à la première proposition de kaléidoscope, les cabinets de conseils en affaires publiques, du fait des nouveaux outils et nouvelles organisations sont susceptibles d’être plus proches des outils du plaidoyer et des intérêts sociétaux-environnementaux que nous l’analysions au début de nos travaux.

En revanche, les syndicats, fédérations, organisations patronales et salariales ne se déplacent que peu entre la première et la seconde proposition — l’analyse ayant illustré leur proximité avec la contribution à la décision publique et la défense d’intérêts plutôt économiques, distinguant les intérêts économiques des entreprises et des socio-économiques salariés.

Enfin, les associations et ONG environnementales se retrouvent toujours dans la zone proche des intérêts sociétaux-environnementaux, mais tendent plus vers le lobbying que la première proposition, notre analyse ayant démontré que ces entités font tant du lobbying que du plaidoyer.  

Lobbying ONG Citoyen Entreprise
Figure 4 Seconde tentative de Kaléidoscope de la représentation d’intérêts environnementale.  Analyse quantitative et qualitative par Axel DARUT & Michel GERMOND

L’essentiel… « une distinction & des frontières évolutives »

La distinction entre lobbying et plaidoyer est d’autant plus mouvante que les frontières sont évolutives, en termes de pratiques, d’outils et d’organisations qui font leur apparition.

> Du côté des acteurs privés, certains usent encore de « l’astroturfing » pour créer une parole convergente avec leurs positions, qui prennent la forme d’un mouvement citoyens. Mais d’autres ont pris le chemin d’une ouverture au débat public et entrent dans l’agora pour tenter de conjuguer intérêts privés et intérêt général, dans une démarche plus transparente, plus constructive —se rapprochant des pratiques de plaidoyer des associations environnementales. Cette approche d’écoute et de conviction des citoyens et des consommateurs par l’entreprise privée est aujourd’hui prise à bras le corps, en veillant à équilibrer intérêts économiques, intérêt général et enjeux environnementaux — avec l’exigence par la société civile de moyens voire de résultats de (contre les « fair » ou « green washing »).

> Certains acteurs privés décident même d’aller plus loin avec l’adoption d’une raison d’être voire la qualité de société à mission en usant des pratiques propres au plaidoyer et à des outils plus ouverts et transparents de représentation d’intérêts. Ce nouveau rôle économique et dans la société imposant ainsi aux acteurs privés de repenser leurs relations avec les pouvoirs publics.

> De leurs côtés, les citoyens s’emparent également d’un nouveau lobbying, qui s’amplifie et s’institutionnalise en réaction à une crise de la représentativité politique et un sentiment de ne pas être suffisamment entendu dans le débat politique, législatif et réglementaire malgré les outils institutionnels à disposition.  Si cette pratique de « lobbying citoyen » n’était auparavant que peu institutionnalisée et portée à titre individuel ou au sein de collectifs éphémères, elle s’ancre désormais par une mobilisation plus permanente et structurée via des associations et des actions planifiées sur le long terme ; et va même jusqu’ à se politiser pour faire muter le citoyen en décideur public.

> Ces nouveaux outils et usages font ainsi émerger des nouvelles organisations dont l’objectif est de promouvoir une représentation d’intérêt plus ouverte et transparente pour les acteurs privés, et une expertise affaires publiques plus technique pour les acteurs associatifs et ONG.

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[1] A. BRUNEL, Emission France Inter « Les légendes du Web » du 13 mai 2016, « L’astroturfing, ou comment bidonner des initiatives citoyennes » avec Charles Ponsard, observateur de la désinformation sur le web et Christian Harbulot, directeur de l’Ecole de guerre Economique, également auteur du petit livre « Fabricants d’Intox ». Emission accessible via ce lien

[2] LAURENS S., « Astroturfs et ONG de consommateurs téléguidées à Bruxelles. Quand le business se crée une légitimité « par en bas » », Critique internationale, 2(2), 83-99, 2015

[3]S. BEDER , « “Public Relationsˮ Role in Manufacturing Artificial Grass Roots Coalitions », Public Relations Quarterly, 43 (2), 1998, p. 21-32

[4] Comme le souligne Sylvain Laurens, certains articles relevant de la « stratégie d’entreprise » ne sont pas loin de considérer l’astroturf comme une composante à part entière des stratégies modernes des firmes. LYON T.P. & MAXWELL J.W., , « Astroturf: Interest Group Lobbying and Corporate Strategy », Journal of Economics & Management Strategy, 13 (4), 2004, p. 561-597

[5] VAN SANT G., «Promised Land», 2012

[6] MATTHEWS J, « Modifying protests: how the biotech industry is garnering support», The ecologist, 1er février 2003

[7]H. MICHEL, «, « La “société civile” dans la gouvernance européenne : Éléments pour une sociologie d’une catégorie politique », Actes de la recherche en sciences sociales, 166-167, p. 30-37, 2007

[8] D. GEORGAKAKIS , « Le champ de l’eurocratie. Une sociologie politique du personnel de l’UE », Paris, Économica, 2012.

[9]S. LAURENS, F. MARCHAN, M  VAN CRIEKINGEN, « “Il faut de tout pour faire un monde clos” : genèse historique, délimitations matérielles et symboliques du “quartier européen” à Bruxelles, 1960-2010 », Actes de la recherche en sciences sociales, 195, p. 78-97, 2012

[10] BLÄSER R.,.« Les ONG transnationales à Genève et à Bruxelles. Densité institutionnelle et opportunités socio-spatiales dans des villes mondiales », Annales de géographie, 668 (4), p. 382-396, 2009

[11] BAISNEE O., « The European Public Sphere Does not Exist (at least It’s Worth Wondering…) », European Journal of Communication, 22, p. 493-505, 2007

[12] LAURENS S., « Astroturfs et ONG de consommateurs téléguidées à Bruxelles. Quand le business se crée une légitimité « par en bas » », Critique internationale, 2(2), 83-99, 2015

[13] Ibid

[14] Directive 2019/904 du Parlement européen et du Conseil du 5 juin 2019 relative à la réduction de l’incidence de certains produits en plastique sur l’environnement, accessible via ce lien

[15] Nouveau plan d’action pour l’économie circulaire, Commission européenne, 11 mars 2020, accessible via ce lien

[16] « Pacte vert pour l’Europe – notre ambition: être le premier continent neutre pour le climat »,  Commission européenne, objectifs du mandat 2019-2024 accessibles via ce lien

[17] S. LAURENS ., « Astroturfs et ONG de consommateurs téléguidées à Bruxelles. Quand le business se crée une légitimité « par en bas » », Critique internationale, 2(2), 83-99, 2015

[18] TABRIZI A., « Seaspiracy », 2021

[19] Cette dénonciation ayant ensuite était critiquée de la part des associations environnementales elles-mêmes ; pour en savoir plus : MCVEIGH K., « Netflix documentary accused of misrepresentation by participants », The Guardian, 31 mars 2021, accessible via ce lien

[20] J. LINDGAARD, « Attention, un lobby électrique se cache derrière cette association «écolo» », Médiapart, 31 Mai 2012, article accessible via ce lien

[21] LAURENS S., « Astroturfs et ONG de consommateurs téléguidées à Bruxelles. Quand le business se crée une légitimité « par en bas » », Critique internationale, 2(2), 83-99, 2015

[22] BOULAY S., « Exploration du phénomène d’astroturfing : une stratégie de communication usurpant l’identité citoyenne dans l’espace public », Communiquer, 7, pp. 61-84, 2012

[23] Site internet de l’association « Regards Citoyens » accessible via ce lien

[24] BROSCHEID A., COEN D., « Insider and Outsider Lobbying of the European Commission: An Informational Model of Forum Politics », European Union Politics, 4 (2), pp. 165-189, 2003

[25] Site internet du Plan national santé environnement (PNSE) 4 « Un environnement, une santé (2021-2025), accessible via ce lien

[26] Consultation nationale pour la troisième stratégie nationale la biodiversité « Mobilisons-nous pour l’élaboration de la nouvelle stratégie nationale pour la biodiversité ! » accessible via ce lien

[27] Site de la « Feuille de route pour l’Economie Circulaire (FREC) » accessible via ce lien

[28] Site recensant les initiatives citoyennes européennes, accessible via ce lien

[29] Article 227 du Traité sur le Fonctionnement de l’Union européenne : « Tout citoyen de l’Union, ainsi que toute personne physique ou morale résidant ou ayant son siège statutaire dans un État membre, a le droit de présenter, à titre individuel ou en association avec d’autres citoyens ou personnes, une pétition au Parlement européen sur un sujet relevant des domaines d’activité de l’Union et qui le ou la concerne directement. »

[30] Plateforme de dépôt et de soutien des pétitions de l’Assemblée nationale accessible via ce lien

[31] Plateforme de dépôt et de soutien des pétitions du Sénat accessible via ce lien

[32] Pétition « Pour l’abolition de la chasse à courre » sur le site de l’Assemblée Nationale, accessible via ce lien

[33] SAUVE J-M., « Servir l’État aujourd’hui », Revue française d’administration publique, vol. 165, no. 1, 2018

[34]  COURTY G., « Les groupes d’intérêt », La Découverte, 2006

[35] CANONNE J., « Le lobbying », Sciences Humaines, vol. 326, no. 6, pp. 13-13, 2020

[36] Site du collectif citoyen lobbyiste d’intérêt commun  

[37] Cf Site du collectif citoyen lobbyiste d’intérêt commun  

[38] Site de VoxPublic

[39] Site de la base Paris 

[40]Greenpeace « Join the political network » accessible via ce lien

[41] Podcast Code source « Climat : et si la solution était de désobéir », Le Parisien , 24 mai 2019, accessible via ce lien

[42] X, RENOU – Petit manuel de désobéissance civile, 2009.

[43] Delphine E ;, « Désobéissance civile : Les « Faucheurs de chaises » font reparler d’eux », France Inter, 9 décembre 2016, accessible via ce lien

[44] HOURQUEBIE D., « Cinq militants « décrocheurs » de portraits d’Emmanuel Macron relaxés au nom de « la liberté d’expression » », Le Monde, 27 octobre 2020 accessible via ce lien ; Justine G-B. « Un décrocheur de portrait d’Emmanuel Macron relaxé au nom de la liberté d’expression », Reporterre, 20 avril 2021, accessible via ce lien

[45] 20 heures le journal, France 2,  «  Haute Garonne : Les Faucheurs d’OGM », 25 juillet 2004, source INA accessible via ce lien ; 19/20 édition nationale, France 3, « Faucheurs volontaires de champs OGM », 7 juillet 2007, source INA accessible via ce lien.

[46] S. ORTEGA , « Grandpuits : des écologistes démontent le greenwashing de Total, Rapports de force – l’info pour les mouvements sociaux, 28 janvier 2021, accessible via ce lien

[47]J. CARRETTE, « Écologistes et travailleurs du pétrole manifestent chez Total », Reporterre,9 février 2021, accessible via ce lien

[48] Site de l’association Tous Elus « La démocratie n’existe pas. A nous de l’inventer » via ce lien

[49] Programme de formation des citoyens « Pourquoi pas toi ? » pour se présenter aux élections législatives, accessible via ce lien

[50] Site internet de la « Primaire populaire – Pour le climat, pour la justice sociale, pour la victoire en 2022 » accessible via ce lien

[51] HOWARD B., Outsiders. Études de sociologie de la déviance, Paris, Métailié, 1985

[52] Entretien du 27 avril 2021 avec Léa Mathieu Figueiredo – responsable plaidoyer industrie lourde au sein du Réseau Action Climat

[53] Ibid.

[54] V-X. MORVAN ., « les entreprises dans l’Agora », Stratégies – le média des nouveaux modèles, 2 Mai 2019, accessible via ce lien

[55] Ibid

[56] L. MACHU  « Plus d’un jeune sur deux pourrait accepter un travail qui paye mal s’il a du sens », Le Figaro étudiants, 10 février 2020, relayant le sondage Opinion Way pour le salon des entrepreneurs démontrant que la quête du sens est désormais un critère très important pour les jeunes en recherche d’un emploi, 95% d’entre eux la jugeant importante, voire prioritaire

[57] R. LESCURUEUX , « #MoiJeune : Environnement, logement, transports… Notre sondage révèle les attentes des jeunes pour les élections municipales », sondage Opinion Way pour 20 minutes, 27 février 2020, accessible via ce lien

[58] Podcast « Second Souffle » APRI influences, association du Master ARPI de Sciences Po Bordeaux, « il faut construire un lobbying socialement acceptable » avec Laurence Girard et Louis Mennecart, étudiants du Master APRI, accessible via ce lien

[59] Site internet de la Climate Action 100+ accessible via ce lien

[60] Communiqué de Presse du Ministère de la transition écologique, « Pacte National sur les emballages plastiques : le gouvernement, des entreprises françaises et des ONG s’engagent », 21 février 2019, accessible via ce lien

[61] Pacte dates de consommation accessible via ce lien  

[62] Site internet de l’usine extraordinaire accessible via ce lien

[63] STIGLER G.J., «The Theory of Economic Regulation », The Bell Journal of Economics and Management Science, vol. 2, no. 1, pp. 3–21, 1971

[64] J  ATTIAS & A. LUMBROSO A.ce lien

[65] Site internet de Make.org accessible via ce lien

[66] Ibid

[67] Site internet de la Grande cause Agissons ensemble pour le climat de Make.org accessible via ce lien

[68] Site internet de la Convention21 accessible via ce lien

[69] Site internet de « The Good Lobby» accessible via ce lien

[70] Site internet du Philantro-lab accessible via ce lien

[71] Entretien du 9 avril 2021 avec Gaëtan de Royer Dupré, président du cabinet de conseils en affaires publiques, plaidoyer et concertation Koz

[72] Jacquet P., « La contestation de la mondialisation », L’Économie politique, no 13, 2002

[73] Déclaration HATVP de Greenlobby accessible via ce lien

[74] Déclaration HATVP d’Ecolobby, accessible via ce lien

[75] Citation de Hugo Cartalas, co-fondateur de Greenlobby, sur le site internet de l’association accessible via ce lien

[76] Citation de Véronique Gramond, co-fondatrice de Greenlobby, sur le site internet de l’association accessible via ce lien

[77] Entretien du 31 mars 2021 avec Jordan Allouche, fondateur d’Ecolobby – « agence d’affaires publiques d’un genre nouveau : ouverte, transparente et responsable ».

[78] Article 1833 du code civil, qui était inchangé depuis 1978

[79] Article 1835 du code civil, qui était inchangé depuis 1978

[80] Article L.210-10 du code de commerce, nouvellement créé. Des dispositions similaires ont été adoptées, notamment dans le code des assurances ou encore dans le code de mutualisé pour les sociétés soumises à une réglementation particulière.

[81] Danone est le fruit de plusieurs opérations de fusions-acquisitions au cours des XXe et XXIe siècles. Il n’existe donc pas un point de départ univoque pour l’histoire du Groupe, quoique le storytelling actuel tende à faire d’Antoine Riboud le principal fondateur du leader mondial des produits laitiers, de la nutrition infantile et des eaux minérales.

[82] La mise aux statuts de la raison d’être et de la mission dans les statuts du groupe a été approuvée à plus de 99 % par l’assemblée générale des actionnaires.

[83] L’INSEE définit le développement durable comme suit : « Le développement durable est « un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs« , citation de Mme Gro Harlem Brundtland, Premier ministre norvégien (1987). En 1992, le Sommet de la Terre à Rio, tenu sous l’égide des Nations unies, officialise la notion de développement durable et celle des trois piliers (économie/écologie/social) : un développement économiquement efficace, socialement équitable et écologiquement soutenable. »

[84] Fils d’Antoine Riboud et son successeur à la présidence de Danone, lorsque la gouvernance de la firme était « bicéphale ». La gouvernance deviendra provisoirement « monocéphale » sous la présidence-direction générale d’Emmanuel Faber. Depuis le départ de ce dernier, l’exécutif de Danone est de nouveau divisé entre un président (chairman) et un directeur général (CEO). Concernant la différence entre président et DG d’une société anonyme à conseil d’administration, v. les articles L. 225-51 et L. 225-51-1 du code de commerce.

[85] Rapport remis aux ministres de l’économie et des finances, de la transition écologique et solidaire, de la justice et du travail le 9 mars 2018,

[86] Certaines sont devenues sociétés à mission, d’autres sont des entreprises à raison d’être.

[87] Entendons financiarisé par « coté sur les marchés financiers ».

[88] Rapport « L’entreprise, objet d’intérêt collectif », 2018, p. 3

[89] Au sens de la loi PACTE adoptée en 2019. Pour aller plus loin, v. le décret 2020-1 concernant la qualité de société à mission (2 janvier 2020) et l’arrêté du 27 mai 2021 « relatifs aux modalités selon lesquelles l’organisme tiers indépendant chargé de vérifier l’exécution par les sociétés, mutuelles et unions à mission de leurs objectifs sociaux et environnementaux accomplit sa mission » et le décret du 27 mai 2021 « portant diverses mesures relatives aux sociétés, mutuelles et unions à mission, aux institutions de prévoyance et aux fonds de pérennité ».

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